Sérigraphie : comprendre l'impression d'art à l'écran

Qu'est-ce que la sérigraphie ?

La sérigraphie est une technique d'impression artisanale qui dépose l'encre au travers d'un écran tendu, zone par zone, couleur après couleur. À l'inverse des procédés industriels pensés pour de très grands volumes, elle privilégie la densité, la matière et le contrôle manuel.

C'est pour cela qu'on parle de sérigraphie d'art : chaque tirage résulte d'un geste précis, d'un réglage minutieux et d'un passage d'encre maîtrisé. Le rendu est profond. Les aplats sont francs. Les teintes spéciales — métalliques, fluorescentes, vernis sélectifs — prennent tout leur sens. L'objet final assume son statut d'édition.

Photo d'illustration de la sérigraphie

© Photo de Johanna Buguet

Aux origines : des pochoirs aux écrans modernes

L'ancêtre de la sérigraphie est le pochoir. On masque une zone, on colore ce qui reste visible. Le principe traverse les siècles.

Au XXe siècle, la technique s'industrialise avec l'apparition d'écrans de soie — puis de polyester —, d'émulsions photosensibles et d'encres adaptées aux papiers beaux-arts. C'est l'explosion de la screen print culture dans l'affiche, le design graphique et l'art contemporain. Des ateliers d'affiches de concerts à l'atelier d'Andy Warhol, la sérigraphie s'installe durablement parmi les techniques de référence quand on veut un rendu expressif et durable.

Pourquoi ? Parce qu'elle offre quelque chose d'introuvable ailleurs : une intensité chromatique brute, une présence physique, et la possibilité de jouer avec des encres qui défient les standards.

La technique, simplement expliquée

Concrètement, comment ça marche ?

Un écran — une maille tendue sur un cadre — est enduit d'une émulsion photosensible. Le visuel de la couleur n°1 est reporté via un typon : les zones opaques protègent l'émulsion, les zones transparentes laissent la lumière la durcir. Après rinçage, l'écran se comporte comme un pochoir extrêmement fin.

Il est posé sur le papier. L'encre est déposée, puis tirée à la raclette pour traverser la maille uniquement là où l'écran a été "ouvert". On répète l'opération pour chaque couleur. C'est ce qu'on appelle une passe.

Entre chaque passe, l'imprimeur vérifie l'encrage et le calage — c'est-à-dire l'alignement parfait des couches — pour que contours et dégradés tombent juste. Le papier sèche entre les couleurs. Certaines encres demandent une cuisson ou un tunnel de séchage pour atteindre leur résistance finale.

C'est lent. C'est méticuleux. C'est exactement pour ça que ça fonctionne.

Le processus en atelier, étape par étape

Tout commence par la séparation des couleurs. Le visuel original est décomposé en autant de couches qu'il y aura de passes. Un dessin à quatre couleurs ? Quatre écrans. Un dessin à douze couleurs ? Douze écrans. Chaque couche doit être pensée pour s'empiler sans bavure.

Vient ensuite la préparation des écrans : tension, enduction, insolation. Puis le mélange des encres pour obtenir exactement les teintes souhaitées, avec des tests sur des chutes de papier. On ne devine pas. On teste, on ajuste, on recommence.

Lors du tirage, l'imprimeur règle la pression de la raclette, l'angle, la vitesse et la quantité d'encre. Les premiers exemplaires servent de BAT — bon à tirer. On ajuste jusqu'à valider l'équilibre couleur/contraste.

Le tirage s'effectue alors sérieusement, en contrôlant régulièrement la régularité des aplats, la netteté des traits, l'absence de bavures et la constance du dépôt. À la fin, chaque affiche est mise à sécher, contrôlée une à une, puis numérotée et souvent signée.

C'est cette exigence de contrôle qui distingue un tirage limité de qualité d'une impression lambda.

Ce que la sérigraphie apporte au rendu

La force de la sérigraphie tient dans la matière.

Les couleurs sont opaques, intenses, avec un dépôt d'encre parfois perceptible au toucher qui crée un micro-relief. Les aplats sont d'un bloc, sans bruit de trame visible. Et les encres spéciales — métalliques, nacrées, fluorescentes ou glow-in-the-dark — révèlent des nuances impossibles à reproduire fidèlement par d'autres procédés.

Sur un papier beaux-arts adapté — grammage élevé, coton, surface légèrement texturée — le couple encre/papier produit une profondeur visuelle qui fait la différence au mur, derrière un verre de qualité.

On ne regarde pas une sérigraphie comme on regarde une impression offset. On la voit. On la sent, presque.

Avantages et limites, sans langue de bois

Choisir la sérigraphie, c'est assumer un choix esthétique et un savoir-faire.

Les atouts sont clairs : densité chromatique, durabilité exceptionnelle, compatibilité avec des encres et effets spéciaux, caractère collectible grâce à la numérotation et à la signature, et une vraie cohérence avec une démarche d'édition.

En contrepartie, le procédé est manuel et séquentiel. Chaque couleur demande un écran, un calage et un temps de séchage. Cela rend la technique moins adaptée aux très grands tirages. Les visuels avec des dizaines de teintes ou de micro-dégradés photo-réalistes demanderont un travail de séparation plus complexe.

On accepte aussi l'idée que chaque exemplaire possède de légères variations. Loin d'être un défaut, c'est l'empreinte du geste. Deux affiches d'une même série ne seront jamais absolument identiques. C'est ce qui fait qu'on les collectionne.

Quand privilégier la sérigraphie ?

La sérigraphie est idéale quand on veut fabriquer un objet d'art.

Affiches d'artiste, éditions limitées, visuels graphiques à aplats puissants, palettes réduites mais assumées, ou au contraire teintes spéciales introuvables ailleurs. C'est le bon choix pour les affiches de collection, la mise en valeur d'illustrations, la réinterprétation d'œuvres cultes, et plus largement tout projet où le rendu physique compte autant que le fichier d'origine.

Si l'objectif premier est la standardisation absolue sur des milliers d'exemplaires à coût unitaire minimal, d'autres procédés industriels seront plus pertinents. Mais dès qu'on parle d'intention, de présence au mur et d'attachement à l'objet, la sérigraphie s'impose.

Papier, encadrement et conservation

Le choix du papier influence fortement le résultat. Un papier épais, stable, au pH neutre, valorise le dépôt d'encre et assure une bonne tenue dans le temps.

Pour l'encadrement, on conseille un verre de qualité — idéalement antireflet et anti-UV — et un passe-partout pour laisser l'affiche respirer. Évite la lumière directe prolongée et les pièces trop humides. À la réception, laisse l'affiche se reposer à plat avant encadrement si elle a voyagé en tube.

Ces gestes simples prolongent l'éclat des couleurs et préservent le papier. Une sérigraphie bien conservée traverse les décennies sans faiblir.

Lire une fiche "sérigraphie" sans se tromper

Sur une fiche d'édition soignée, tu retrouveras le format, le type de papier, le nombre de passes — autant de couleurs tirées —, l'atelier d'impression, le tirage exact (par exemple 200 exemplaires), la mention numérotée/signée, ainsi que d'éventuels effets spéciaux comme les encres métalliques, les vernis ou les effets phosphorescents.

Ces informations te permettent d'évaluer le niveau de travail engagé et d'anticiper le rendu réel au mur. Chez TAIN, nous détaillons ces points pour chaque édition afin de rendre la lecture la plus transparente possible.

Pas de jargon opaque. Pas de mentions floues. Juste les faits, clairement exposés.

Quelques questions qu'on nous pose souvent

La sérigraphie convient-elle aux dégradés ?

Oui, mais elle les aborde différemment. On utilise des trames et des séparations adaptées. Pour des photos ultra-riches en micro-nuances, on étudie au cas par cas. Certains visuels s'y prêtent mieux que d'autres.

Pourquoi les séries sont-elles limitées ?

Parce que le procédé est manuel et que la rareté fait partie de l'intention. Garantir la qualité de chaque exemplaire et préserver le statut d'édition, c'est ce qui donne du sens à un tirage limité.

Chaque affiche est-elle exactement identique ?

Non, et c'est ce qui fait le charme d'un tirage artisanal. De très légères variations peuvent exister d'un exemplaire à l'autre. On ne cherche pas la perfection industrielle. On cherche la cohérence et la qualité.

Envie d'aller plus loin ?

Jette un œil à nos éditions sérigraphiées en tirage limité.

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